Didier Ndengue

A DOUALA : Les doléances du patronat centrafricain

En plus de la crise politico-militaire qui perdure et rend les activités commerciales infructueuses, les importations à partir du Cameroun sont au poids mort.

En séjour de travail en fin de semaine dernière à Douala, le président de l’Union nationale du patronat centrafricain, Gilles‐Gilbert Gresenguet, n’est pas resté sans mot dire sur la situation qui prévaut dans son pays. Il s’est notamment exprimé sur la question des entreprises centrafricaines qui traversent une période extrêmement difficile. «La situation des entreprises en Centrafriqueest dramatique», a‐t‐il confié. Pendant la période de crise, ajoute‐t‐il, beaucoup d’entreprises ont été pillées, les outils de production détruits, les matériels et les machines emportés «par les soidisant libérateurs». Les entreprises centrafricaines ont subi de plein fouet les actes de vandalisme qui ont mis à terre la petite économie qu’elles généraient avant la déchéance de François Bozizé en mars 2013. Le patronat chiffre les pertes à plus de cent milliards de Franc CFA. L’Etat centrafricain, appelé à soutenir le secteur privé dans la relance de l’économie nationale, est sans voix. «Il s’agit actuellement de reconstituerles unités de production. Les entreprises attendent leur argent des pouvoirs publics qui, malheureusement, eux aussi n’en disposent pas», regrette Gilles‐Gilbert Gresenguet. Avec des dossiers déjà constitués,les créateurs de richesses centrafricains n’attendent plus que le soutien des pouvoirs publics et de potentiels investisseurs étrangers.

D’autres goulots d’étranglement

 Au‐delà du territoire national, les frontières centrafricaines subissent sûrement le plus grand coup de la décennie. «Nousavons un problème de goulots d’étranglementau niveau de l’approvisionnement au niveaudu Cameroun». Depuis l’arrivée des aides humanitaires, la fluidité du trafic des marchandises est devenue très difficile. «Çanous pose aussi des problèmes». Actuellement, les entreprises centrafricaines, minées par l’absence des fonds de trésorerie et de garanties, ne pourront pas facilement bénéficier d’un soutien bancaire. Il est «difficilepour les banques aussi de faire desprêts, parce que nous n’avons pas de garantiesnécessaires, toutes nos garanties ont été emportées», explique le président du patronat centrafricain. Et de conclure que les investisseurs ne s’engagent que dans un pays en paix.

La Centrafrique en crise
Les entreprises centrafricaines ont tout perdu

 Didier Ndengue


MOBILISATION : L’union sacrée des patrons africains

La première rencontre des organisations patronales d’Afrique centrale et de l’Ouest s’est tenue du 9 au 10 octobre à Douala. Occasion pour le secteur prive africain d’éplucher ses difficultés et de proposer des pistes de solution visant à être en phase avec le train de l’émergence de l’Afrique.

L’Afrique est en proie grandissante des investisseurs. Selon le Pr. Roger Tsafack Nanfosso, président du Cercle de réflexion économique du Gicam (CREG), «elle bouge, elle renait mêmede ses cendres. Son émergence est imminente ». A en croire ce dernier, tous les investissements au sein du continent africain, étrangers ou des africains, contribuent à son émergence. Mais une expertise locale démontre que les investisseurs étrangers envahissent en majorité le continent. Il importe donc aux africains de s’engager fortement dans l’investissement de l’Afrique.

Coalition des entreprises africaines

Les organisations patronales de l’Afrique centrale et de l’Ouest se sont réunies autour de deux plateformes: l’Union des patronats d’Afrique centrale (Unipace) et la Fédération des organisations patronales d’Afrique de l’Ouest (Fopao) sous le thème: «Contribution dupatronat à l’émergence de l’Afrique». Elles ont opté pour une stratégie d’action commune des entreprises africaines pour mieux structurer le développement économique de l’Afrique. La finalité étant l’organisation unanime des investisseurs africains pour ne pas rater le train de l’émergence du continent. «L’Afrique est au cœur de toutesles convoitises. Et donc, l’Afrique vaêtre dans les prochaines décennies laprincipale destination des investisseursdu monde entier. C’est le premier constat. Si les entreprises africaines ne s’organisent pas, ce rendezvous risque de se faire sans elles», explique André Fotso, président de l’Unipace et du Groupement interpatronal du Cameroun (Gicam). C’est en février dernier à Abidjan que le président de la Fopao, Jean Kacou Diagouet André Fotso concluent qu’il est important d’ouvrir un pont entre les entreprises de l’Afrique centrale et de l’Ouest. «L’autre constat, c’est également l’initiative du BIT en septembre 2012 qui rappelait qu’il était important que les organisations patronales africaines renforcent leurs gouvernances de manière à être un interlocuteur incontournable visàvis des pouvoirs publics dans la définition des politiques économiques ». Du 9 au 10 octobre au siège du Gicam dans la capitale économique camerounaise, les patronat sont jeté les premières bases de ce qui devrait désormais être une nouvelle dynamique. Avant toute autre chose, ils se sont partagé des expériences de manière à permettre une mise à niveau de chaque patronat dans chaque pays.A l’issue, la modernisation du secteur de l’agriculture du continent qui devra croître d’ici 2050 afin de nourrir les 2,4 milliards de la population mondiale dont la moitié en Afrique et le renforcement du dialogue public – privé également.

 Construire l’Afrique avec les africains

Selon un constat formel, la plupart des grands chantiers d’infrastructures se réalisent en Afrique sans les entreprises africaines. «Nouspensons qu’il est temps que les entreprisesafricaines s’impliquent en semettant ensemble pour améliorer leurposition à travers un échange de savoir-faire,à travers une amélioration deleurs capacités de financement et à traversune vision de taille qui soit continentale », renchérit André Fotso. Conclusion de Bernard N’doumi, Vice‐président de la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI): «on a vu que nosentreprises deviennent de plus en plusfortes certes, mais elles sont encore tropseules pour l’être. Il y a un vieux proverbeque vous connaissez: «L’Unionfait la force». En étant donc réunies,elles seront plus fortes, car on sait aujourd’huice que nous représentonsdans les PIB de nos différents pays.Mais si chacun reste dans son coin, çane produira aucun effet pour le développementde nos entreprises. Et maintenant,on a compris qu’il fallait mettreensemble les forces, créer unesynergie et être un opérateur de poidsdevant les pouvoirs publics ».

Didier Ndengue 


INTÉGRATION AFRICAINE : Plaidoyer pour la libre circulation des personnes et biens

Les opérateurs économiques de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cemac) et de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) appellent à l’ouverture des frontières pour le développement économique et l’émergence de l’Afrique.

Le Camerounais Dieudonné Tietse, comme plusieurs autres opérateurs économiques africains, rencontre toujours d’énormes difficultés de transfert d’argent pour faire tourner ses affaires: «De l’autre côté de l’Afrique del’Ouest, je ne peux pas transférer del’argent d’Abidjan pour le Cameroun.Il devient impossible de changer leFranc CFA d’Afrique de l’Ouest enFranc CFA d’Afrique centrale». De même, pour se déplacer à travers le continent pour signer des contrats de travail pour son entreprise, il fait tout le temps face aux procédures d’obtention du visa devenues de plus en plus complexes et difficiles. «Pour se rendreau Gabon, il faut une lettre d’invitationsignée dans une mairie, avoir uneréservation d’hôtel au Gabon, un certainnombre de papiers médicaux, le relevéde compte bancaire et d’autres papiersencore… Tout ça rend les chosescompliquées» s’indigne le Camerounais qui, sans cesse, se révolte au sujet de «l’intégration sous régionaleafricaine» qui reste encore dans les grandes théories des langages des hommes politiques et dirigeants africains. Patron de la société Paness implantée à Abidjan et à Libreville, spécialisée dans la formation, conseil et informatique, Dieudonné Tietse voit ses activités en constante régression au fur et à mesure que les jours passent. Son rêve d’élargir ses activités en Afrique et de transmettre son expertise à d’autres Africains est donc voué à l’échec. Et également, depuis un certain temps, Dieudonné Tietse broie du noir. A l’origine de ses difficultés, la libre circulation des biens et des personnes qui n’est pas totalement effective dans les différentes sous‐régions d’Afrique. Ceci constitue un frein au développement et à l’émergence de l’Afrique. «Pour qu’uneéconomie fonctionne et s’intègre correctement,il faut que les hommes circulent,et il faut que l’argent circuleaussi. Et pour que l’argent circule, ilfaut que les gens n’aient pas d’obstaclesliés aux échanges, aux droits de transfert, à la limitation du volume du montant à circuler», renchérit- il.

Entre manque de volonté et lenteur des procédures

 Régis Loussou Kiki, secrétaire général de la Confédération patronale gabonaise, apprend que le débat pour une monnaie unique en Afrique centrale et de l’Ouest est sur la table des experts économiques. En Côte d’Ivoire, on pense que ce problème de monnaie unique, bien que relevant du domaine économique, est d’abord politique. Selon un observateur, la mauvaise foi des autorités compétentes ou alors la lenteur des procédures y relatives sont à l’origine de ce malaise économique qui commence déjà à secouer les deux régions. «Sur le plan économique pur, permettezmoi l’expression, c’est une absurdité d’avoir une monnaie en zone Cemac et d’en avoir une autre en zone UEMOA. La vérité est qu’on devrait avoir la même monnaie. D’ailleurs,ce sont les mêmes billets, à part les couleurs qui changent. Derrière tout ça, il y a une question de volonté politique.Pour l’instant, il n’y en apas», s’indigne Bernard N’doumi, Vice‐président de la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI). Pour certains patrons africains en conclave la semaine dernière dans la capitale économique camerounaise, les deux monnaies, pourtant rattachées à l’Euro, devraient librement circuler sans conditions. «En réalité,vous ne pouvez pas avoir une intégration véritable et un développement harmonieux et solide entre l’Afrique centrale et l’Afrique de l’Ouest si la question de la monnaie n’est pas réglée », conclut un leader d’une organisation patronale d’Afrique de l’Ouest. La crise économique n’étant plus d’actualité aujourd’hui, il est donc important d’envisager revenir à la case de départ et que les banques fonctionnent de manière harmonieuse pour qu’on ait une seule monnaie, pense M. Bernard N’doumi. «Ça devrait permettre aux deux zones économiques qui sont toutes engagées dans les APE, d’être véritablement solides et d’engager cette évolution vers la croissance de façon durable et de façon soutenue»,conclut Dieudonné Tietse.

Didier Ndengue


Carte postale : Douala otage des matières fécales

Les drains et caniveaux de la cité économique sont de vrais gouffres de déchets qui exposent les populations au choléra, au paludisme…

Scène courante dans les rues de la ville de Douala. Sous une forte pluie ce lundi 11 août, une bande d’enfants dont la tranche d’âge varie entre 3 et 8 ans, reviennent tout joyeux des cours de vacances organisés à l’école anglophone « Government Bilingual Primary School » basée à Bonapriso, dans le deuxième arrondissement.Comme à l’accoutumée depuis le retour des pluies, ils plongent leurs pieds dans le courant d’eau débordant des rigoles. La pression d’eau est forte et les tout-petits ne semblent pas s’en rendre compte.

Là où ils s’amusent à puiser l’eau des pluies avec leurs mains et à s’asperger les uns les autres, se trouve un large trou ouvert. L’une des fillettes du groupe tente de mesurer sa profondeur à l’aide de sa jambe gauche. Fort heureusement, une jeune femme assise sur un banc public à l’entrée de l’école décide de l’interrompre dans son élan en tonnant d’une voix forte : « Hé, sortez vite de là ». Sans succès. Comme des sourds, les enfants n’obéissent pas. Mais la jeune femme ne lâche pas prise. Elle insiste : « Je vous ai demandé de sortir de ces eaux ». Le message est passé. Les gamins courent dans tous les sens.

Le courant d’eau peut librement circuler jusqu’à se déverser dans le grand drain mal en point, basé au niveau de l’ancien collège des nations, vers la rue des pavés. Ici, la dégradation se voit à l’œil nu. Les maisons construites au bord de ce passage d’eau, au niveau de la chefferie de Bonapriso y vidangent tous leurs déchets, y compris ceux des WC. Les tuyaux d’évacuation et quelques morceaux de selles y sont perceptibles à tout moment. A chaque saison des pluies, comme c’est le cas actuellement dans la capitale économique, les eaux stagnent ici, les populations et les enfants s’y baignent régulièrement. Les maisons sont inondées.

La circulation des véhicules n’est pas possible sur cette voie qui relie les quartiers New-Bell et Bonapriso. Depuis plusieurs années, le gouvernement tente en vain de trouver une solution à ce problème. La dernière, un immeuble r+8 a été présenté comme la véritable cause des inondations au quartier Bonapriso. Après concertations entre le propriétaire de l’immeuble et le délégué du gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Douala (Cud) Fritz Ntonè Ntonè, ledit obstacle, qui aurait été construit sur le trajet fluvial de Douala, a été démoli à l’aide des explosifs par le génie militaire.

Seulement, quelques jours après la démolition de cet immeuble, plusieurs interrogations collent aux lèvres de certains riverains. « Vu que cet immeuble était entouré de plusieurs maisons et autres grands immeubles, que va faire le gouvernement pour les autres pour faire passer l’eau? Est-ce qu’il va aussi détruire toutes les maisons des lieux? » s’interroge-t-on à Bonapriso.

Pollution de l’environnement

Tous les caniveaux de la ville de Douala sont bouchés par des déchets, sans exception de quartier. Même le quartier administratif Bonanjo y passe. La présence régulière des eaux pendant les pluies tout autour des services du gouverneur de la région du littoral en est une preuve. Dans les quartiers mal famés, les victimes des inondations se battent avec les eaux souillées. Pelle à la main ce 15 août, Maman Judith tente de redéfinir un passage aux eaux qui stagnent devant sa porte. « Je veux qu’elle coule, parce que quand elle reste là, je me sens mal à l’aise », lance la vieille dame. A en croire cette dernière, le coin pue à chaque inondation. De l’autre côté, c’est une autre femme qui marche en esquivant l’eau qui stagne. « Il y a une fosse septique là-bas que le gouvernement ne voit pas. Elle est construite en pleine route et les enfants jouent sans cesse tout autour. J’ai peur qu’ils y tombent », s’inquiète cette autre riveraine qui craint le pire. La fosse, située vers le « Petit marché » de Ngangué, alimente les inquiétudes.

Le chef des services d’hygiènes et salubrités de la mairie de Douala 2e apprend à ce propos que son département est sur le terrain et veille aux grains. Une voisine de la fosse septique confirme : « J’ai souvent vu les agents de la communauté venir là-bas à cause de cette fosse, mais cela n’a jamais abouti puisque la fosse est encore là et vous-même vous le constatez »

De l’intérieur, le marché central de Douala brille de mille feux. Mais les drains et caniveaux environnants mettent un bémol à l’ambiance. Le grand bluff des autorités de la contrée. Une esquisse de pont du camp Bertaud, qui lorgne jusqu’au camp Yabassi, remet l’hygiène en cause dans cet arrondissement. Pincer le nez à cet endroit est obligatoire pour celui qui traverse les lieux. Souleymane, le réparateur des ceintures y a trouvé un bon endroit pour son business. Il est basé sur le pont. A sa droite se trouve un bac à ordures à moitié vide, alors que les ordures inondent le sol. « Les gens d’ici sont très sales, ils urinent, font caca et jettent les ordures partout et pourtant, il y a un bac à ordures », s’indigne Souleymane. Derrière lui s’ouvre un grand ravin recouvert d’herbes et de bouteilles d’eau minérale vides. Ses substances non biodégradables, d’un nombre incalculable, ne bougent pas d’un seul trait, même pendant les fortes inondations que connaît la zone ces derniers jours.

Bonjour choléra, paludisme…

Les eaux des pluies (qui circulent à travers les drains, caniveaux et autres rigoles) sont forcement utilisées ailleurs dans le cadre des travaux domestiques. Elles servent même de boisson à certaines personnes à travers des forages, puits, etc. Leur utilisation n’est pas sans conséquences. « Cette eau peut causer le choléra, des infections cutanées et peut aussi favoriser la multiplication des anophèles femelles qui engendrent le paludisme », indique un membre du personnel médical du centre de santé de Bonapriso groupe 2 ». Profitant des inondations, certains propriétaires des maisons ouvrent leurs fosses septiques pour laisser évacuer les déchets.

Carte postale : Douala otage des matières fécales
Des poubelles en vogue
Une ville bouchée par des ordures
Au coeur de la poubelle

« Avant, quand j’étais petite, les services d’hygiène passaient régulièrement vérifier nos toilettes. Ils montraient l’attitude à tenir à mes parents et rappelaient que la fosse septique allait être bientôt pleine et qu’il fallait prendre rendez-vous avec un vidangeur. Aujourd’hui, chacun fait ce qu’il veut et pourrit l’environnement », renchérit notre interlocuteur du centre médical. Face à leurs responsabilités, les pollueurs ne savent que dire : « On va faire comment ? »

Didier Ndengue


A partir du Cameroun: 120 sénégalais rapatriés d’Afrique centrale

Leur chef d’Etat, Macky Sall, a affrété un avion vendredi 3 octobre pour ramener au bercail tous ceux qui ont fuis la guerre civile en République centrafricaine et d’autres cas en détresse au pays de Paul Biya.

La présidence de la République sénégalaise suit de très près l’évolution des activités de ses compatriotes en Afrique centrale. Ceux vivant sur les territoires instables préoccupent singulièrement Macky Sall. En Afrique centrale, la situation humanitaire des sénégalais de la République centrafricaine (Rca) est préoccupantes depuis le déclenchement de la guerre civile. Plusieurs d’entre eux sont entrés au Cameroun avec les délégations des personnes ayant fui la Rca à cause de l’insécurité qui y a fait son nid. Tous se sont réfugiés à l’Est du pays de Paul Biya, où ils ont bénéficié du soutien du Haut commissariat aux réfugiés (Hcr). Mais la crise humanitaire de cette région du pays est préoccupante. Même le Hcr est débordé. L’ayant donc constaté, l’Etat sénégalais est monté au créneau pour venir en aide à tous ses ressortissants en situation de détresse. D’où l’idée de les recenser et de les rapatrier.

Le rapatriement est volontaire et ne concerne en majorité que les sénégalais qui ont fui la République centrafricaine. C’est depuis plus de cinq mois que le dispositif lié à cette opération de rapatriement est mobilisé par la présidence de la République sénégalaise. Après récemment au camp de réfugiés à l’Est du Cameroun, la première vague de 70 sénégalais a quitté le sol camerounais en fin de semaine dernière. Les 50 autres suivront plus tard. L’action gouvernementale est menée par l’ambassade du Sénégal au Cameroun sous la férule de S.E. Aliou Ndao Fall. Afin de s’assurer du bon fonctionnement de cette opération, l’ambassadeur accompagne personnellement ses compatriotes dans le même vol jusqu’au pays natal.

Les cas nécessiteux

Pour être à l’heure à l’aéroport international de Douala au moment de l’embarquement dans l’après-midi, le diplomate et son premier conseiller Boubacar Sow ont quitté Yaoundé très tôt en matinée avec les sénégalais à rapatrier. Sur place à Douala, madame le consul honoraire Mareme Malong Salb remplissait toutes les formalités liées à cette opération auprès de la compagnie Sénégal Airlines et de l’antenne Douala du ministère camerounais des Relations extérieures (Minrex). Selon des confidences du personnel du consulat à Douala, très mobilisé depuis le lancement de l’opération, on retiendra que tous les frais liés au rapatriement sont entièrement pris en charge par l’Etat du Sénégal. « L’opération entre dans le cadre de la protection des ressortissants sénégalais de l’étranger ».

Macky Sall
le président de tous les sénégalais
En plus de ceux recensés avec le concourt du Hcr, certains sénégalais malades vivant dans la précarité ou en situation d’errance dans les autres régions du Cameroun sont également bénéficiaires de cette largesse, qui leur permettra de retrouver en toute quiétude le pays natal. D’autres sénégalais ont toutefois préféré attendre sur place au Cameroun que la paix et la stabilité soient restaurées en Rca pour y retourner. Car, là-bas, ils ont abandonné tous leurs biens et parfois leurs familles.

Didier Ndengue


Franc CFA, APE, néocolonialisme : le ras-le-bol de Joe La Conscience

Le combattant camerounais s’apprêtait à manifester devant le consulat de France à Douala vendredi dernier lorsqu’il a été arrêté par les services de renseignements généraux. Il croupit actuellement dans des geôles secrètes de la capitale économique du Cameroun.

Ce vendredi 03 octobre 2014 à Bonanjo au consulat général de France, il est 11 heures. Six policiers lourdement armés, sont assis sous le manguier devant le consulat. En face, de l’autre côté de la route où se trouve la villa abritant les services consulaires français, les demandeurs de visa forment une longue file d’attente. Les activités vont apparemment bon train au sein de la représentation diplomatique française de la capitale économique camerounaise. Mais au regard de l’atmosphère générale des lieux, quelque chose ne tourne pas rond. La présence soudaine des agents de la police sur le site annonce sûrement un événement. « C’est depuis hier jeudi qu’ils sont là. Je crois qu’ils sont venus sécuriser les lieux, certainement à cause de ce qui s’est passé à Bamenda », explique un vendeur clandestin rencontré devant le consulat.

Vers 13 heures, le dispositif sécuritaire va se renforcer. Plusieurs véhicules de police et des agents de renseignement vont arrivés de façon à attirer tous les regards. A l’intérieur du consulat de France, la pression se fait de plus en plus ressentir. Les employés vident les bureaux. Chacun sort avec sa voiture et fonce vers une direction inconnue, pour ne pas faire face à la manifestation qu’un combattant engagé camerounais a promis d’engager sur les lieux cet après-midi. A 14 heures précises, l’extérieur du consulat ne grouille plus que de policiers armés de matraques et de fusils. Tout un arsenal de guerre déployé devant le consulat pour traquer « les rebelles » annoncés.

Joe La Conscience arrêté

Au regard de la forte mobilisation policière devant le consulat général de France vendredi, on s’attendait à de costauds adversaires. Curieusement, c’est un jeune homme, le seul manifestant d’ailleurs, nommé Joe La Conscience, tout vêtu en vert rouge jaune, couleurs du drapeau de la République du Cameroun. Il entend manifester contre les Accords de partenariat économique (APE), le Franc CFA et d’autres accords signés entre la France et le Cameroun « visant à maintenir son pays esclave ». le combattant, comme il aime affectueusement se faire appeler, demande une rupture totale de la coopération franco-camerounaise. A en croire ce dernier, « le Cameroun ne peut pas vouloir être émergent en restant lié à ces charognards » de Français. Pour remplacer le Franc CFA, Joe La Conscience propose le « Um » aux autorités camerounaises, en mémoire au nationaliste Um Nyobe. A peine arrivé devant le consulat, le combattant va aussitôt être arrêté par les policiers. Il n’a eu que quelques petites minutes pour dérouler et brandir sa banderole conçue pour la circonstance.

Pour Joe La Conscience, le message est passé. Selon les Renseignements généraux qui l’ont auditionné après son coup, le jeune homme n’avait pas obtenu une autorisation de manifestation. Lui de répliquer lors de son interpellation : « a-t-on besoin d’une autorisation pour dire son mécontentement ? » Aux dernières nouvelles, Joe La Conscience, que nous avons au téléphone dimanche matin, était gardé dans l’une des cellules secrètes de la ville de Douala. Il a demandé à être auditionné en présence de son avocat. Les autorités sécuritaires attendent vraisemblablement l’ouverture des services administratifs compétents ce lundi pour le mettre à la disposition de la justice. Affaire à suivre.

Joe la conscience
Celui qui veut libérer son pays de la France
Didier Ndengue


Douala : Les abeilles de l’église ont disparu

Un essaim d'abeillesCela après avoir fait un bon miel aux fervents chrétiens de la chapelle.
Elles sont reparties d’où elles sont venues, laissant derrière elles un fruit impérissable. Plusieurs témoins ont assisté à leur évasion mardi 23 septembre 2014, mais nul ne sait avec exactitude quelle direction elles ont pris.
La sœur Huguette était sur les lieux à l’heure des faits. S’étant rendue à l’église pour des raisons d’hygiène, elle témoigne que c’est aux alentours de 13 heures qu’elle a vu l’essaim d’abeilles disparaitre dans les nuages. Un voisin, n’appartenant pas à la même assemblée chrétienne, a confirmé les faits.
En effet, l’essaim d’abeilles avait une mission précise qu’elle a entièrement accomplie. Pêchées sur une latte soutenant les tôles d’une petite maison de prière sise au lieudit New-Bell Bassa dans le deuxième arrondissement de Douala pendant plus de deux mois, les abeilles ont produit un miel qui a été dégusté par l’ensemble des chrétiens de l’église en question.

Didier Ndengue


Morgue de Logbaba : Des corps en décomposition

Morgue de Logbaba

Le manque d’un dispositif approprié dans la morgue est à l’ origine de ce drame qui perdure depuis quelques semaines.

Vendredi 26 septembre 2014, il est 11 heures environ. A l’hôpital de district de Logbaba, sis à Douala troisième dans la cité économique camerounaise, l’ambiance est morose. Une musique religieuse jouée en douce par une gérante d’un débit de boisson anime allégrement les lieux. Des personnes venues à la levée des corps ont le regard braqué à la morgue. L’attente est très longue. Toute vêtue de noire, Clarisse Kengne patiente depuis prés de deux heures de temps. « Il y a trop de retard. La première levée de corps prévue à 9 heures a finalement eu lieu à plus de 11 heures. Nous sommes impatients d’attendre », souligne la jeune femme. Plus loin, vers le marché des cercueils de la morgue, la douleur est perceptible sur les visages des proches des défunts gardés dans cette morgue. Gerbes de fleurs en mains, las d’attendre, certains membres des familles éprouvées tournent en rond. D’une jeune femme venant solliciter une chaise auprès d’une vendeuse de cercueils pour un moment de repos, on apprend que la longue attente résulte des longs traitements des corps qui sont en phase de décomposition. L’on fait état de ce que, depuis plusieurs jours, des corps en putréfaction sortent de la morgue, accablant les familles. Ngogoue Claire est dans tous ses états. Sa petite sœur décédée le 12 septembre 2014 et dont le corps avait été gardé dans cette morgue, présente plusieurs parties dégradées (bras, poitrine, abdomen…). « Le corps n’avait pas de problèmes quand nous l’avons déposé ici à la morgue. Il a été mal conservé et maintenant, il a pourri au point ou le voyage pour le village natal est prévu, sans plus attendre, ce jour même après la levée du corps », explique Ngogoue Claire, abattue.

Les raisons du drame

Le directeur de l’hôpital de district de Logbaba, Dr Charles Soffeu, donne plusieurs raisons à l’origine de cet état de choses. Il fait premièrement allusion au dépôt tardif des corps à la morgue par les proches des défunts, ensuite aux coupures intempestives d’électricité, enfin a l’insuffisance criarde de chambres froides au sein de l’hôpital. En lieu et place d’une chambre froide, la morgue de Logbaba dispose des caisses frigorifiques. En vue de remédier à ce problème, Dr Charles Soffeu informe que « l’hôpital est en chantier depuis un mois. Le circuit électrique est en train d’être refait. Nous attendons également un groupe électrogène de dix millions de franc CFA d’un partenaire ». En attendant le parachèvement du chantier qui avance visiblement à pas de tortue, des corps continuent d’être amenés par dizaine à la morgue de l’hôpital de district de Logbaba et ressortent en mauvais état.

Didier Ndengue


Douala : L’offensive diplomatique de la CUD

Ntonè Ntonè, délégué du gouvernement CUDDes projets de soirée interculturelle et de foire socioculturelle ont été approuvés par l’ensemble des représentants des pays et organisations diplomatiques et consulaires présents dans la capitale économique du Cameroun.

Le délégué du gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Douala (CUD), Fritz Ntonè Ntonè, a présenté un discours devant un parterre de diplomates des pays et organisations amis du Cameroun. C’était jeudi 25 septembre dans la salle Rodolphe Tokoto de l’hôtel de ville de Douala, à l’ occasion de la réalisation de deux grands concepts d’échange socioculturel d’envergure internationale. Le premier concerne une « soirée interculturelle » qui permettra de « promouvoir la diversité culturelle et d’accentuer le niveau d’intégration des différentes communautés des pays étrangers vivant à Douala et sur l’ensemble du territoire camerounais, conduisant à la fluidification des relations avec les populations locales », justifie Fritz Ntonè Ntonè. Le second est une « foire socioculturelle et économique » qui regroupe les différents acteurs culturels et économiques non seulement camerounais, mais aussi des communautés étrangères de la ville de Douala. Ceci dans le but d’améliorer la visibilité des échanges interculturels. En d’autres termes, la CUD veut, à travers ces concepts innovateurs, faire un rapprochement entre le monde diplomatique et les populations locales. « Pour une bonne symphonie entre ces deux structures, les collectivités territoriales décentralisées doivent s’arrimer à la modernisation de son fonctionnement et à une ouverture vers l’extérieur », renchérit le délégué du gouvernement.

Les préoccupations des diplomates
Intéressés, les diplomates ont aussitôt adopté le projet. « Je trouve que c’est une très bonne initiative du délégué. Les deux événements sont à saluer. Mais nous ne savons pas encore les modalités de participation », explique Ouedraogo Mahamadou, Vice-consul du Mali. Pour Francis Koffi Tomety, consul a. i du Togo, il serait plus bénéfique pour tous les participants que la soirée interculturelle se tienne pendant trois jours successifs (vendredi, samedi et dimanche). Au niveau de la CUD, on peaufine les derniers détails pour réussir l’organisation de la première édition de la soirée interculturelle prévue au mois de novembre 2014 sous le thème: « Douala, ville animée par sa diversité et son brassage international ». Les expositions d’œuvres issues de la diversité culturelle, œuvres théâtrales, chants et danses traditionnels, gastronomie diversifiée… meubleront le rendez-vous. La foire socioculturelle et économie, quant à elle, est annoncée pour le premier semestre de l’année 2015 et elle a pour objectifs: d’offrir une plateforme d’exposition du savoir-faire des communautés étrangères de la ville de Douala; de participer au rayonnement de la ville au niveau international; de recueillir les difficultés et les attentes des étrangers installes dans la ville.
Didier Ndengue


Ebola: ennemi public numéro un

Photo Ebola

1-Des chiffres qui font peur
Le 22 septembre dernier, l’Organisation mondiale de la santé (Oms) est montée au créneau pour dresser le bilan des six mois de règne du virus Ebola. Il en ressort que le nombre cumulé de cas et de décès officiellement notifiés à l’Oms, entre le 23 mars et le 22 septembre 2014, s’élève a 5843 cas dont 2 803 décès. A ce jour, 337 agents de santé sont infectés du virus, et au moins 181 parmi eux sont décédés. Le Liberia vient en pôle position avec 113 nouveaux cas détectés sur une période de 24 heures. Ce pays, très pauvre en infrastructures sanitaires pour prendre en charge les malades d’Ebola, ne cesse d’enregistrer de nouveaux décès chaque jour. L’Oms n’a pas le chiffre exact des morts survenus dans le bidonville de West Point, à Monrovia. Notoirement pauvres, sales et surpeuplés, les victimes d’ici sont simplement jetées dans les cours d’eau. Le seul hôpital universitaire de recours, John. F. Kennedy Medical Center à Monrovia, n’y peut rien, car mal équipé. Au Nigeria, le gouvernement, pour freiner la montée en puissance de la fièvre hémorragique, a construit deux nouveaux centres spécialisés pour son traitement à Lagos et à Port Harcourt. L’Oms rapporte que 15 cas ont été confirmés à Lagos, 4 à Port Harcourt, pour 7 décès au total. Le 29 août, le Sénégal a connu son premier cas d’Ebola, aussitôt maitrisé grâce à l’expertise locale. La RDC expérimente le fléau pour sa septième fois. L’épidémie apparait pour la première fois en 1976 dans une zone jouxtant la rivière Ebola au Zaïre. Selon l’Oms, la cause de la flambée est classique, en l’occurrence la manipulation du gibier infecté. « Il ne s’agit pas seulement d’une flambée épidémique. Il ne s’agit pas seulement d’une crise de santé publique. C’est aussi une crise sociale, une crise humanitaire, une crise politique, une crise économique, représentant une menace pour la sécurité nationale bien au-delà des zones d’épidémie », indiquait Dr Margaret Chan, directeur général de l’Oms, le 18 septembre 2014 à la réunion d’urgence du Conseil de sécurité des Nations unies sur la paix et la sécurité en Afrique.

2-Mobilisation tous azimuts
A la faveur de la tenue de la 69e Assemblée générale de l’Onu, la communauté internationale est au front depuis la fin de la semaine dernière. Des contingents d’experts et spécialistes de la maladie prêtent désormais main forte aux pays touchés. On signale un contingent cubain de 165 médecins et autres personnels de santé sur le sol sierra-léonais. Barack Obama, président américain, a promis, du haut de la tribune de l’Assemblée générale des Nations unies la semaine dernière d’envoyer en Afrique de l’Ouest 3000 militaires et des spécialistes des maladies infectieuses. UNMEER, mission des Nations unies destinée à coordonner la réponse au virus, a par ailleurs annoncé le début de ses activités sur le terrain. Ernest Koroma et Ellen Johnson Sirleaf n’étaient pas à l’Onu. Respectivement présidents sierra-léonais et libérien, les deux dirigeants, ont préféré rester dans leurs pays respectifs pour faire face au fléau. Ils sont intervenus devant leurs homologues par vidéoconférence pour décrire la situation qui prévaut sur le terrain. « Nous affrontons peut-être le plus grand des défis et nous ne pouvons pas nous permettre d’envisager le scenario le plus noir dans lequel plus de 100.000 de nos concitoyens innocents mourront, a déclaré Ellen Johnson Sirleaf. Avec votre aide, nous sommes prêts à surmonter cette nouvelle épreuve. ». Et Barack Obama de réconforter: « Nous ne pouvons pas agir seuls, nous n’avons pas la capacité de tout faire nous-mêmes. A mes homologues de Sierra Leone, du Liberia et de Guinée, aux peuples de l’Afrique de l’Ouest, aux agences de santé qui travaillent héroïquement sur le terrain pendant que nous discutons, je veux dire: vous n’êtes pas seuls ». Depuis le week-end dernier, des équipes de la mission UNMEER, dirigées par Antony Banbury, ont installé leur quartier général à Accra, au Ghana. « La mission des Nations unies UNMEER s’est déjà procurée deux millions d’équipements de protection. On envoie 470 véhicules tout-terrain dans la région. On a déjà cinq hélicoptères qui se rendent sur place et on pourrait atteindre les 18. On envoie des avions dans la région. Nous sommes déjà présents dans les quatre villes les plus touchées et Accra accueillera le quartier général. UNMEER est déjà présente à Monrovia, en Sierra Leone et en Guinée. Une présence minimale pour l’instant, mais qui va s’accroitre très vite. Le QG va se déployer de New York à Accra ce dimanche… Et nous serons à Monrovia mercredi, à Freetown vendredi et Conakry le dimanche suivant. On avance le plus vite possible pour mettre en place cette stratégie », a expliqué l’Onu. Ban Kimoon, son Secrétaire général, a lancé un appel: « Le monde peut et doit arrêter Ebola. Maintenant! » Margareth Chan, la directrice générale de l’Oms a également réagi jeudi dernier lors d’une réunion de haut niveau sur Ebola. Allant dans le même sens que le Sg de l’Onu, elle a rappelé qu’il y a urgence à agir contre l’ennemi. De nombreux vaccins expérimentaux contre le virus d’Ebola pourraient être disponibles début 2015. A en croire des sources onusiennes, un milliard de dollars serait nécessaire pour lutter efficacement contre le virus. La Banque mondiale a promis de fournir 400 millions de dollars.

Didier Ndengue