Journée mondiale des réfugiés : leurs cris de détresse me déchirent le cœur
La précarité dans laquelle ils sont plongés est inhumaine. Le cas de Douala est indescriptible au moment où la communauté internationale célèbre la 17e édition de la Journée mondiale des réfugiés.
Ce mardi matin, je décide de remettre ma casquette de « reporter humanitaire » de la bonne école. Je n’ai pas les sous dans mes poches trouées, mais je souhaite absolument rencontrer des personnes vulnérables, comme je le faisais à l’époque avant d’être déçu par le côté inhumain des organisations dites humanitaires. Aujourd’hui, leur côté trouble ne m’intéresse pas. Sans perdre trop de temps, je fonce dans une banlieue perdue de la cité économique camerounaise pour repérer quelques vieilles connaissances. Direction : Dakar ou encore Madagascar (nom d’un quartier de Douala situé dans le troisième arrondissement).
Je traverse un pont, avant de tomber sur un foyer de réfugiés guinéens vivant dans des conditions assez précaires. Ils passent leurs nuits ici, dans une chambre abandonnée, construite en planches. Sa porte centrale n’a plus de vachette. Environ dix personnes se partagent ce lieu. Ils dorment tous sur des nappes, ou matelas qu’ils étalent à même le sol. Pas de ventilateur ici. Chaque nuit, ils sont exposés à la chaleur et moustiques.
Débrouillardise
Quand le jour se lève, ces jeunes hommes dont l’âge varie entre 18 et 40 ans, plient leurs nappes et matelas qu’ils rangent dans un coin de la maison. Sans avoir pris le petit déjeuner, faute de moyen, ils foncent direction le grand marché du quartier pour donner un coup de main aux commerçants. D’autres excellent dans la cordonnerie, ou dans la vente de glaces, friperie ou de bonbons. C’est ainsi qu’ils gagnent leur vie. Cette catégorie de réfugiés s’en sort mieux que celle qui a des femmes et des enfants réfugiés.
Précarité
Je quitte le quartier Dakar pour « Village », une autre banlieue de Douala, où j’ai pris rendez-vous avec une réfugiée d’origine tchadienne. Cette ancienne militaire a fui son pays natal à cause des menaces de mort qui pesaient sur elle et sur sa famille. Cet après-midi, la tchadienne est visiblement abattue à cause des multiples problèmes que sa famille traverse ici. Elle raconte qu’elle a fait la Libye, avant la chute du guide Mouammar Kadhafi. Là-bas, ses conditions de vie étaient mille fois meilleures que celles que lui offre son nouveau pays d’accueil. Elle a l’impression de vivre en enfer avec toute sa famille, régulièrement secouée par diverses maladies chroniques. Son époux est au chômage et ses enfants sont constamment affaiblis par de violents maux.
Ils n’ont rien à se mettre sous la dent aujourd’hui. Ce qui fait qu’ils sont obligés de supplier l’aide du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Après avoir côtoyé les femmes réfugiées qui vendent les arachides grillées en bordures de route, malgré les intimidations de la police municipales qui les demandent sans cesse de libérer les trottoirs, et après avoir également échangé avec leurs maris, qui ont du mal à trouver un job à cause de leur statut, j’affirme que les réfugiés sont dans la merde au Cameroun.
Au niveau de Douala, par exemple, ils considèrent le HCR comme leur dieu. Un dieu qui, visiblement, est insensible à leurs cris de détresse depuis quelques années à cause de leur budget de fonctionnement qui « aurait chuté ». Mais comment comprendre que leur enveloppe qui a diminué, permet au personnel du HCR-Douala, de mener une vie de luxe en louant une nouvelle villa dans un quartier chic et en multipliant les partenaires ?
Indignation
Ce 20 juin 2017, le collectif des réfugiés de Douala boycotte la journée mondiale des réfugiés, à cause du mauvais traitement que leur inflige le personnel du HCR-Douala. Peu avant cette célébration, ils ont demandé au HCR de revoir leur situation, sinon, ils ne se mobiliseront pas pour leur journée. Dans un document que j’ai reçu, le collectif que dirige Jean Louis Kalema Ngongo dénonce « le non respect des droits fondamentaux et vitaux des réfugiés de Douala, le HCR ayant mis en place la politique de se servir au lieu de servir les pauvres réfugiés ».
Au moment où je rédige cet article, on me signale qu’un réfugié tchadien a été victime d’un AVC et que les humanitaires n’ont pas levé le petit doigt pour lui venir en aide. Il se raconte dans les milieux des réfugiés que leurs hôpitaux partenaires négligent constamment ces derniers, c’est pour cela qu’ils décèdent à Douala.
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