Voyages de Paul Biya à l’étranger : un gouffre financier

Article : Voyages de Paul Biya à l’étranger : un gouffre financier
Crédit:
5 mars 2018

Voyages de Paul Biya à l’étranger : un gouffre financier

Un collectif composé de journalistes et de blogueurs a rendu public le rapport d’une enquête sur les voyages du président camerounais à l’extérieur du pays depuis son ascension à la magistrature suprême en 1982. L’enveloppe estimée de ses nombreux déplacements est tout simplement « exorbitante » pour un pays pauvre très endetté comme le nôtre. Regardons ici de plus près ce rapport, que le gouvernement tente de balayer d’un revers de la main avec la complicité des médias à sa solde.

Un collectif composé de journalistes et blogueurs a rendu public un rapport d’une enquête sur les voyages du président camerounais à l’extérieur du pays depuis son ascension à la magistrature suprême en 1982. L’enveloppe estimative de ses nombreux déplacements est tout simplement « exorbitante » pour un pays pauvre très endetté comme le nôtre. J’épluche ici ce rapport que le gouvernement tente de balayer d’un revers de la main avec la complicité des médias à sa solde.
Voyages par année (1)

La semaine dernière, le résumé d’une enquête intitulée « Paul Biya, le président fantôme » révèle au grand jour les grosses dépenses effectuées par le chef de l’Etat camerounais pendant ses nombreux déplacements à l’étranger depuis son ascension à la magistrature suprême en 1982. Rédigée par  Emmanuel Freudenthal, Frank William Batchou, et Gaelle Tjat, l’enquête  -que j’ai entièrement lue- fait savoir que « les voyages du président sont nombreux : il a passé plus de cinq ans et demi à l’étranger depuis 1982. Certaines années, il a passé un tiers de son temps à l’étranger, comme en 2009 et en 2016 ». Regroupés au sein du collectif Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP), les enquêteurs, constitués de journalistes et de blogueurs chevronnés, a épluché plus de 4000 Unes du quotidien bilingue gouvernemental, Cameroon Tribune. Plus de 190 voyages du président camerounais ont été documentés. On peut conclure que Paul Biya a passé au moins 4 ans et demi en « courts séjours privés » à l’étranger durant ses 36 ans de règne. « Ces estimations sont un strict minimum car les copies du Cameroon Tribune sont difficiles à dénicher au Cameroun, et les archives que nous avons pu consulter aux Etats-Unis et en France ne sont pas complètes, des années entières manquent à l’appel avec autant de voyages », regrettent les auteurs du rapport.

L’enveloppe qui choque

Nous le savons tous, Genève (Suisse) est la destination préférée du locataire d’Etoudi depuis plus de trois décennies, il parait qu’il fait partie des meilleurs clients de l’hôtel 5 étoiles Intercontinental… A la lecture du document, j’apprends qu’il s’y rend régulièrement en jet privé, accompagné de son épouse Chantal Biya et de ses plus proches collaborateurs. D’ailleurs, certains de ses compagnons de voyage ont quitté le navire suite au réaménagement gouvernemental le 2 mars 2018.

A en croire les auteurs de l’enquête, les dépenses journalières du président lors de ses voyages dépassent les 21 millions de FCFA, « soit un total de plus de 34 milliards de FCFA depuis l’arrivée de Paul Biya au pouvoir, sans compter les voyages officiels ou la location de l’avion privé ».

Un collectif composé de journalistes et blogueurs a rendu public un rapport d’une enquête sur les voyages du président camerounais à l’extérieur du pays depuis son ascension à la magistrature suprême en 1982. L’enveloppe estimative de ses nombreux déplacements est tout simplement « exorbitante » pour un pays pauvre très endetté comme le nôtre. J’épluche ici ce rapport que le gouvernement tente de balayer d’un revers de la main avec la complicité des médias à sa solde.
Carte des pays visités par nombre de visites

L’Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) dit avoir obtenu des factures indiquant qu’un aller-retour de Yaoundé à Genève en 2010 a coûté 401 millions de FCFA. « A ce tarif, pense l’organisation, la facture du transport pour les voyages de Paul Biya serait d’au moins 76 milliards de FCFA depuis son arrivée au pouvoir ». Ces révélations, reprises par les médias nationaux et internationaux, n’ont pas laissé le gouvernement camerounais indifférent. Pour le top management de Cameroon Tribune, ces divulgations ont été faites par les « dénigreurs » du chef de l’Etat dont l’ambition de le discréditer pour la prochaine élection présidentielle. Ce qui laisse penser que « l’homme lion » – comme l’appellent affectueusement ses camarades – sera candidat à l’élection présidentielle qui pointe à l’horizon.

Dans une mise au point du quotidien gouvernemental, Joseph Le, le président du conseil d’administration et par ailleurs directeur adjoint du cabinet civil de la présidence de la République (avant le réaménagement gouvernemental), réagit en ces termes : « La société éditrice de Cameroon Tribune (Sopecam) ne reconnaît pas avoir été associée, ni de près ni de loin, à une quelconque « recherche » ou « enquête » relative aux déplacements du chef de l’Etat à l’étranger », il se dédouane donc. Pour Joseph Le, « il faudrait chercher ailleurs les sources documentaires et les véritables motivations des pseudo-révélations livrées à l’opinion, à l’effet manifeste de l’infester et de jeter du discrédit sur un homme d’Etat qui s’emploie au quotidien à donner la pleine mesure de ses capacités, dans le cadre de l’édification d’un Cameroun prospère et paisible, quelque soit l’endroit du monde où il se trouve ». Un des auteurs de l’enquête m’a fait savoir que leur collectif avait adressé un protocole d’interview au Cabinet civil de la présidence de la République, qui n’a jamais répondu jusqu’à la publication de l’enquête.
La question qui se pose est la suivante : pourquoi n’avoir pas répondu aux questions d’un dossier aussi explosif avant sa publication ?

→ Lire l’enquête de l’OCCRF (en anglais)

Étiquettes
Partagez

Commentaires

raja
Répondre

Merci Didier Ndengue. Bonne soirée

Didier Ndengue
Répondre

Merci d’être passe par ici.
Bonne soirée.