Quand la racaille s’en prend à une mémé « sorcière »

Article : Quand la racaille s’en prend à une mémé « sorcière »
Crédit:
31 juillet 2017

Quand la racaille s’en prend à une mémé « sorcière »

Ils ont carrément perdu la raison. Ces jeunes camerounais, censés être au chevet des personnes du troisième âge, n’éprouvent aucune compassion quand celles-ci, affaiblies par les maladies et l’âge, trébuchent. Au lieu de les secourir, ils les bastonnent sous prétexte qu’elles sont des sorcières. Incroyable, mais vrai !

Des voix s’élèvent de l’autre coté de la rue. Elles attirent la curiosité des riverains. Tout le quartier est en mouvement. Les gens sont dehors. Ils assistent à un spectacle inédit. A l’aide de leurs téléphones portables, plusieurs se contentent de filmer la scène, qu’ils balancent aussitôt sur les réseaux sociaux, pour animer leurs communautés Facebook et WhatsApp. Ils se réjouissent des commentaires qui en découlent. Pendant ce temps, elle reçoit des coups de fouet sévères de ceux qui peuvent être ses arrières petits-fils. S’exprimant en pidgin, elle voulait juste qu’on l’aide à retrouver le chemin de la maison familiale. Mais personne n’a prêté attention à ses doléances. Même pas les jeunes garçons qui se montrent souvent gentils dans le quartier.

Sa petite voix épuisée, a été pour eux un prétexte de conclure qu’elle est tombée d’une boite de sardine et a atterri sur le toit d’une maison du quartier. Cette boite de sardine représenterait l’avion de nuit qui transporterait les sorciers noirs. Selon les dires des populations, le pilote de cet engin a laissé tomber la vieille pendant le vol. « C’est sûr qu’ils revenaient d’un coup quelque part dans le monde », chuchote-t-on dans les parages.

Paralysée par terre, elle n’arrive pas à se mettre debout pour affirmer ou infirmer ce qui se raconte sur elle. Un coté de son corps frôle la rigole où les ménagères déversent leurs ordures. Les chasseurs de sorciers ont réussi à déchirer presque tous ses vêtements et à exposer ses parties intimes.

Les passants sont donc servis gratuitement. La vieille saigne. Mais les gouttes de sang à coté d’elle ne découragent pas ses bourreaux.

Plus rien n’arrête ces fous furieux. Comme s’il avait été piqué par un moustique, l’un des bastonneurs se dirige vers la maison la plus proche, se saisit d’un seau de 15 litres qu’il remplit d’eau. Mais non le gars, tu ne vas pas quand même verser cette eau sur la mémé ! Le salaud l’a fait avant même que je ne finisse de m’étonner. Et la bastonnade peut continuer sans l’intervention de la police alertée il y a plusieurs dizaines de minutes. Prés de trente minutes se sont écoulées et les hommes en tenue sont toujours absents. Il y a pourtant un commissariat de police à 2 minutes à pied de ce lieu.

Une vieille femme traitée de sorcière

Sentence de mort confirmée

Dans leur folie, ils trainent la vieille comme une ordure. La foule est de plus en plus bruyante. Elle ne donne aucune chance à cette femme âgée de s’exprimer. Ils envisagent même de passer à la vitesse supérieure. L’heure est venue, pensent-ils, d’en découdre définitivement avec cette vieille « sorcière ». Et la meilleure option est de l’arroser de pétrole et de la brûler vivante. Ils sont tous unanimes. Aucune objection. Personne n’ose se mettre à la place de la famille de cette vieille dame. Elle pourrait aussi avoir des enfants et des petits enfants.

Ils veulent ôter la vie à une personne qu’ils ne connaissent même pas. La vie est pourtant précieuse, ils doivent sûrement le savoir. Et les cheveux blancs sont la couronne des vieillards. La bible le dit. Qui leur a même permis de le faire ? De croire qu’il faut brûler un homme vif pour une raison qui ne tient pas debout ? Ils sont tellement occupés à planifier leur meurtre qu’ils ne m’écoutent même pas.

Le cri qui délivre

Le sort de la vieille est scellé. Elle s’est évanouie avant le retour de celui qui est allé acheter le litre de pétrole. Les gens rient aux éclats, comme à Sodome et Gomorrhe, avec leurs bouches édentées ! Soudain, un cri effroyable déchire l’atmosphère. C’est le cri d’amertume d’une gamine de huit ans troublée par le phénomène. Tout le monde se tourne vers elle, pour savoir ce qui s’est passé pour qu’elle se mette subitement à pleurer à chaudes larmes.

Devant les yeux rouges de ceux qui bastonnent la vieille, elle hausse le ton : « Papa, voila grand-mère couchée, morte, ces gens veulent la brûler…Papa il faut sauver grand-mère ». Son père qui la suivait à distance, va se frayer un passage au milieu de cette foule déchainée. Les larmes aux yeux, il va tomber sur ses deux genoux devant sa mère, qui ne gémit plus. Il va la serrer fort dans ses bras.

Ses bourreaux, pris de panique, vont se retirer un à un après avoir suivi les explications du fils de la « sorcière », qu’ils tabassaient il y a un instant. Ils pouvaient pourtant éviter cette scène, qui fait déjà le tour des réseaux sociaux, en prêtant juste attention aux doléances de cette grand-mère. Ils auraient su qu’elle s’est égarée dans notre grande métropole. Enfin, il suffisait juste de l’écouter pour se rendre compte qu’elle a eu le vertige alors qu’elle tentait en vain, de retrouver le chemin de la maison.

« Elle est en ville depuis quelques jours pour suivre ses soins. Elle n’a pas pris ses comprimés ce matin, c’est pour cela qu’elle a déliré », explique le fils de la dame aux flics qui sont arrivés sur les lieux du drame une dizaine de minutes après le départ des chasseurs de « sorciers ».

La vieille traitée de sorcière a été sauvée de justesse par sa petite fille et transportée dans un centre de santé par son fils, où elle a été réanimée. Pendant ce temps, le phénomène se poursuit. Ceux qui bastonnaient aujourd’hui, sont convaincus qu’ils ne vieilliront jamais ou que leurs parents ne seront pas également un jour traités de sorciers, tabassés et brûlés vifs.

Étiquettes
Partagez

Commentaires

Mireille Flore Chandeup
Répondre

Aie, Didier! J'ai eu très mal. Tu partages cette histoire empreinte de tristesse, ce comportement qu'on ne sait comment déplorer. Tous finissons par avoir un grand parent qui délire. Faut que ça cesse, franchement!

Didier Ndengue
Répondre

Vraiment! Merci d'être passée par ici ma grande